Philippe Buschini Posts

Ras-le-bol des discours nappés de storytelling sirupeux, qui transforment un moteur statistique en philosophe des Lumières. Ras-le-bol de ces nouveaux “gourous” de l’IA, fraîchement convertis, qui confondent produire des phrases fluides et construire une pensée.

On voudrait nous faire croire qu’un LLM médite comme un vieux sage sous un bonsaï, alors qu’il ne fait que brasser des milliards de morceaux de phrases, comme un shaker secoué à toute vitesse. On le pare de sagacité alors qu’il n’est qu’un habile perroquet stochastique, capable d’imiter l’intonation mais incapable de saisir le sens profond de ses propres mots.

ALORS DÉFINITIVEMENT NON, UN LLM NE RÉFLÉCHIT PAS.

Et continuer à prétendre le contraire, c’est avouer qu’on ne sait pas comment cela fonctionne réellement.

OPINION

« Il avait tout : un site responsive, une charte graphique couleur lavande, et une bio écrite en Figma. Et pourtant… il s’est fait ghoster plus vite qu’un stagiaire en fin de période d’essai. »

À 23h12, pendant que vous dormez paisiblement, un inconnu Googlera votre nom. Et là, tout peut s’effondrer. Pas à cause de votre travail… À cause de votre profil Viadeo oublié de 2013 où vous vous disiez “expert en synergies transversales”.

Bienvenue dans le monde merveilleux de la crédibilité numérique passive-agressive, où un silence en ligne est plus suspect qu’un chat qui fait la vaisselle.

Parce que ce n’est pas votre site qui fait vendre. C’est votre trace. Même bancale. Surtout bancale.

BILLET D'HUMEUR

La semaine dernière, je vous parlais des fourmis, ces êtres discrets qui tiennent le monde debout pendant que d’autres paradent sur scène. Cette semaine encore, je ne parlerai pas d’intelligence artificielle, de robots, d’algorithmes ou d’IA génératives …

Aujourd’hui encore, je reste dans cette veine très humaine, très intime. Encore de nous. Toujours de nous. Parce qu’avant de comprendre ce que les machines font à notre pensée, il faut peut-être d’abord comprendre ce que nous avons fait à notre propre capacité de penser.

Cette fois, je vous emmène dans un territoire plus subtil, plus troublant : celui de notre rapport à nos propres idées. Un glissement silencieux qui nous concerne tous, connectés ou pas, technophiles ou technophobes.

Promis, dès la semaine prochaine, je reprends mon cycle « L’IA dans tous ses états ». Mais pour l’instant, laissez-moi encore vous parler de cette chose étrange qui nous arrive quand nous cessons d’habiter nos propres questions…

Vous tapez une question dans votre moteur de recherche. En 0,3 seconde, vous avez votre réponse. Satisfaisant, non ?

Pourtant … quelque chose d’étrange se passe. Cette facilité déconcertante cache peut-être une transformation plus profonde de notre rapport à la pensée.

Il fut un temps où chercher, c’était déjà un acte. Où ne pas savoir immédiatement n’était pas un problème à résoudre, mais un espace à habiter. Aujourd’hui, nous glissons d’une réponse à l’autre, d’un contenu pré-mâché au suivant. Nous validons plus que nous ne choisissons. Nous appliquons plus que nous ne comprenons.

Mais que se passe-t-il quand penser devient optionnel ? Entre l’efficacité séduisante de nos outils et notre ancienne habitude de réfléchir par nous-mêmes, un glissement silencieux s’opère. Pas brutal, pas visible. Juste… confortable.

La question n’est pas de savoir si la technologie est bonne ou mauvaise. Elle est ailleurs, plus intime : reconnaissons-nous encore notre propre voix quand nous pensons ?

BILLET D'HUMEUR

📌 Billet d’humeur du vendredi 📌

Tu ne sais pas vraiment ce que tu fais dans la vie ? Parfait, tu es prêt pour briller en société.

Aujourd’hui, il ne faut plus avoir un métier, il faut avoir une narration. Fini le plombier, bonjour le “spécialiste des flux hydriques résiduels en habitat individuel”. Plus c’est flou, plus c’est chic. Tu vends du vent ? Tant mieux, tant qu’il est disruptif et à forte intensité synergique.

Dans un monde où la clarté est une faute de goût, dire simplement la vérité est devenu obscène. Et pourtant, parfois, ça fait du bien.

👉 Si tu en as marre des “solutions régénératives” et des “roadmaps d’acculturation holistique”, ce texte pourrait bien te parler. Ou te faire rire. Ou les deux.

BILLET D'HUMEUR

Exceptionnellement, je ne parlerai pas d’intelligence artificielle. Pas de robots, pas d’algorithmes, pas de ChatGPT. Juste de nous. De ce phénomène silencieux qui traverse nos hôpitaux, nos écoles, nos ateliers, nos labos. Cette semaine, j’évoque l’effacement progressif d’une classe discrète mais essentielle : celle des fourmis. Celles qui tiennent le monde debout pendant que d’autres dansent sur les ruines. La Fontaine avait écrit La Cigale et la Fourmi. Aujourd’hui, il écrirait peut-être Les Fourmis chassées par les Cigales.

La cigale et la fourmi, saison finale.

Oubliez La Fontaine. Sa fable ne tient plus.
Dans le monde d’aujourd’hui, ce n’est plus la cigale qui se retrouve fort dépourvue quand la bise fut venue. Non, elle exige un droit au chauffage, une indemnité “climatique” et une reconnaissance émotionnelle pour ses hivers difficiles.
Et la fourmi ? Elle n’a plus le temps de répondre. Elle bosse. Enfin… elle bossait.

Notre époque a changé les rôles : la cigale est devenue influenceuse à plein temps, militante de tous les instants, experte en tout, sauf en effort.
La fourmi, elle, s’efface. Éreintée, méprisée, invisible. Elle ne manifeste pas, elle ne crie pas. Elle disparaît. Calmement. Définitivement.

Et pendant que les cigales scrollent, postent et s’indignent à la vitesse de la 5G, les piliers du réel s’effondrent sans bruit.

Un jour, quand la lumière ne s’allumera plus, qu’il n’y aura plus de profs, plus de médecins, plus d’artisans pour réparer les fuites, une voix paniquée demandera :
« Où sont passées les fourmis ? »

Spoiler : elles ne reviennent pas. Elles ont compris. Et elles ont tiré leur révérence.

OPINION