Exceptionnellement, je ne parlerai pas d’intelligence artificielle. Pas de robots, pas d’algorithmes, pas de ChatGPT. Juste de nous. De ce phénomène silencieux qui traverse nos hôpitaux, nos écoles, nos ateliers, nos labos. Cette semaine, j’évoque l’effacement progressif d’une classe discrète mais essentielle : celle des fourmis. Celles qui tiennent le monde debout pendant que d’autres dansent sur les ruines. La Fontaine avait écrit La Cigale et la Fourmi. Aujourd’hui, il écrirait peut-être Les Fourmis chassées par les Cigales.
La cigale et la fourmi, saison finale.
Oubliez La Fontaine. Sa fable ne tient plus.
Dans le monde d’aujourd’hui, ce n’est plus la cigale qui se retrouve fort dépourvue quand la bise fut venue. Non, elle exige un droit au chauffage, une indemnité “climatique” et une reconnaissance émotionnelle pour ses hivers difficiles.
Et la fourmi ? Elle n’a plus le temps de répondre. Elle bosse. Enfin… elle bossait.
Notre époque a changé les rôles : la cigale est devenue influenceuse à plein temps, militante de tous les instants, experte en tout, sauf en effort.
La fourmi, elle, s’efface. Éreintée, méprisée, invisible. Elle ne manifeste pas, elle ne crie pas. Elle disparaît. Calmement. Définitivement.
Et pendant que les cigales scrollent, postent et s’indignent à la vitesse de la 5G, les piliers du réel s’effondrent sans bruit.
Un jour, quand la lumière ne s’allumera plus, qu’il n’y aura plus de profs, plus de médecins, plus d’artisans pour réparer les fuites, une voix paniquée demandera :
« Où sont passées les fourmis ? »
Spoiler : elles ne reviennent pas. Elles ont compris. Et elles ont tiré leur révérence.